Objectif BEPOS 2020 : quels impacts pour les énergéticiens et les habitants ?

Premier pilier de la loi Grenelle II de 2010, l’  « Amélioration énergétique des bâtiments et l’harmonisation des outils de planification » a accouché de la norme BEPOS : Bâtiments à Énergie POSitive. Si la Règlementation thermique 2012 (RT2012) avait déjà induit une évolution des pratiques énergétiques en réduisant la consommation d’énergie primaire des bâtiments, BEPOS franchit un cap supplémentaire : à échéance 2020, tous les bâtiments neufs devront s’y conformer. Un objectif ambitieux, dont la question des impacts sur les réseaux énergétiques, ses acteurs et les habitants se pose actuellement. Quelles sont les particularités de cette norme et quels enjeux représente-t-elle ?

BEPOS : une transition du passif au positif

Avec la RT2012 était né le BEPAS, Bâtiment à Énergie PASsive, dont les consommations en chauffage et rafraîchissement sont inférieures ou égales à 15 kWh/m2/an. Son petit frère, le BEPOS ambitionne un bilan énergétique positif des bâtiments. Il faudra donc bien entendu les doter de systèmes d’énergies renouvelables pour atteindre cet objectif… Les plus fréquents sont l’ajout de panneaux solaires ou d’une pompe à chaleur, mais d’autres moyens peuvent être mobilisés : étanchéité thermique renforcée, ventilation avec récupération de chaleur, récupération des eaux pluviales ou encore épuration naturelle.

Des premiers succès déjà construits…

En 2011, l’ADEME comptait déjà 118 BEPOS sur le territoire français ! Quelques années plus tard, nous avons d’autres exemples supplémentaires, à l’instar du HLM inauguré il y a tout juste un an dans le 11ème arrondissement de Paris par le bailleur social RIVP, ou encore Bonne Energie, immeuble de bureaux à énergie positive en plein cœur de Grenoble (ci-dessous).

Une norme encore en construction et des impacts à clarifier

La Règlementation thermique 2012 (RT2012) avait déjà induit une évolution des pratiques énergétiques, en réduisant la consommation d’énergie primaire des bâtiments neufs à un maximum de 50 kWhEP/(m².an) en moyenne. Mais après son implémentation, certains doutaient de la capacité à embrayer  rapidement sur le BEPOS, dans un délai de 8 ans seulement.

Le BEPOS fait encore l’objet de beaucoup de réflexions et d’interrogations  comme en témoigne l’engouement du forum biannuel BePositive organisé à Lyon en février 2013.  Si de grands projets ont commencé à voir le jour, aucune norme gouvernementale n’existe pour l’instant et les définitions varient selon les acteurs. L’un des enjeux principaux est la définition de l’énergie consommée par le bâtiment : comment est-t-elle calculée ? Doit-on intégrer seulement les consommations règlementaires actuelles ou toutes les consommations y compris domestiques (électroménager…) ? Comment est prise en compte l’énergie « grise », c’est-à-dire les ressources nécessaires à la construction du bâtiment ?

Pour poser les jalons d’une convergence vers une définition commune, l’association Effinergie a créé un label BEPOS Effinergie+ permettant de préciser les contraintes à respecter. In fine, ces constructions devront intégrer 6 pré-requis relativement exigeants:

  • Maîtriser les consommations pour les 5 usages de la  Règlementation Thermique (chauffage, production d’eau chaude sanitaire, refroidissement, éclairage, auxiliaires)
  • Maîtriser les consommations pour les autres usages domestiques de l’énergie
  • Exploiter les énergies renouvelables sur le site
  • Apporter un environnement confortable et sûr
  • Faciliter le comportement écoresponsable des occupants
  • Maîtriser les impacts liés à la construction du bâtiment

Concrètement, le label exige que

  • la production d’énergie renouvelable du bâtiment soit égale ou supérieure à sa consommation d’énergie primaire (à un delta près, calculé en fonction du type du bâtiment et de son emplacement géographique)
  • La consommation d’énergie grise ait été mesurée
  • La consommation d’énergie engendrée par les déplacements des utilisateurs du bâtiment ait été évaluée

Une transformation des réseaux… et des usages

Dans cette démarche d’évolution, les Bâtiments à Énergie Positive bousculeront les règles en termes d’acheminement de l’énergie, puisque les édifices construits en 2020 auront la particularité d’être à la fois des lieux de production et de consommation d’énergie. Ceci suscite des interrogations quant à la gestion de ce dialogue entre réseau et bâtiments. De nombreux gestionnaires de réseaux et fournisseurs d’énergie travaillent sur le « Smart Grid » et sur les solutions d’optimisation en temps-réel de la production, distribution, et de la consommation d’énergie. Passer du bâtiment consommateur à un bâtiment producteur implique également le développement des possibilités de stockage (voir notre article sur le pôle d’Amiens) nécessaires à l’optimisation de la gestion énergétique.

D’autre part, le comportement de l’utilisateur influe sur la consommation énergétique. En effet, deux  usagers différents dans un même bâtiment auront des bilans énergétiques complètement distincts. A noter qu’un degré de chauffage supplémentaire correspond à une augmentation  de consommation de 10 à 15%. Ainsi, à l’avenir, les occupants devront être accompagnés et sensibilisés aux économies d’énergies à l’aide de campagnes d’information. Outre leur performances énergétiques, les bâtiments BEPOS pilotes ont l’avantage de viser un mieux-être qualitatif pour les habitants notamment grâce à l’isolation phonique et thermique, l’éclairage naturel ou encore la végétalisation des espaces intérieurs.

Conclusion

Finalement l’avancée vers le BEPOS se fait sous la contrainte règlementaire, et dans un cadre aux contours flous pour les énergéticiens. Mais ceci ne les empêche pas de continuer à innover pour trouver de nouveaux modes de production et de stockage d’énergie sur place. Une mise au clair du calcul de la consommation d’énergie s’impose désormais, servant de référentiel de base aux différents acteurs impliqués, pour leur permettre d’atteindre les objectifs communs pour 2020.

Quant aux usages des Bâtiments à Bâtiment à Énergie POSitive, si tous les habitants ne partagent pas les mêmes convictions écologiques, l’ambition d’une facture divisée par 3 devrait permettre de trouver un terrain d’entente sur les nouveaux comportements à adopter.

5 thoughts on “Objectif BEPOS 2020 : quels impacts pour les énergéticiens et les habitants ?

  1. Non au faux positif du BEPOS actuel, il est urgent de sortir de cette fausse route absurde !

    Le BEPOS tel qu’il a été mis en œuvre dans les tests jusqu’à présent, en particulier ceux que vous présentez, est un recul par rapport à la maison passive, ces bâtiments en réalité ne sont même pas au niveau d’isolation nécessaire pour être passifs, ils sont tous équipés d’une centrale de chauffage au gaz pour l’hiver 🙁 (quelques uns sont reliés à un réseau de géothermie, ce qui est mieux, mais ces installation ont généralement elle-même une centrale gaz en secours pour les grands froids).

    L’objectif devrait être que le bâtiment BEPOS soit le plus autonome possible, donc certainement pas comme ici un bilan extrêmement négatif en hiver, et excessivement positif en été. Le solaire devrait servir, allié à une isolation élevée et une grande inertie, à ce que l’énergie captée en mi-journée les jours ensoleillée d’hiver permette de le plus possible ne pas dépendre d’apports énergétiques pour les jours qui restent tempérés. Et non à générer des excès pendant l’été censés compenser la perte de l’hiver, alors qu’en fait la grande majorité des émissions CO2 du bâtiment et du secteur électrique ont lieu l’hiver et donc ne peuvent être annulées ainsi.

  2. Merci pour votre commentaire. En effet, comme vous le soulignez, la question du stockage reste très présente. Mais nous pouvons espérer de nouvelles innovations d’ici 2020 pour pallier ce problème ! En revanche, les techniques d’isolation des bâtiments BEPOS sont tout de même plus importantes que dans les constructions dîtes « classiques » : triple vitrage et isolation thermique par l’extérieur sont deux exemples concrets d’avancées sur ce point.

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