Ville intelligente rime souvent avec grande ville. Le concept même de smart city a été forgé pour montrer la capacité des nouvelles technologies à atténuer les maux de la ville en améliorant la qualité de vie de ses habitants et en optimisant ses consommations énergétiques. Pour autant, les grandes villes n’ont pas l’apanage de l’intelligence. La meilleure preuve étant que l’essentiel des projets smart city lancés dans les grandes métropoles du monde se concentrent sur un micro-quartier de cette même ville. Pourquoi une petite ville ayant développé, par exemple, une stratégie d’éclairage intelligent sur l’ensemble de son territoire, ne serait-elle donc pas considérée comme intelligente ? L’urbanisme du XXIème siècle célèbre le « small is beautiful ». Voici donc 8 exemples concrets témoignant de cette tendance : « small is the new smart ».

En France tout d’abord :

  • La commune de Montdidier dans la Somme, 6400 habitants, a mis en place un réseau intelligent sur l’ensemble de la ville, reliant les 1350 points d’éclairage public, les nouvelles productions d’EnR et un programme de pilotage intelligent du réseau. Résultat : +52% de production électrique en EnR et réduction de 27% de la consommation électrique de la commune. Dans le même domaine de l’éclairage intelligent, d’autres villes moyennes ont opté pour une modulation de l’éclairage à distance, à l’instar de Saint-Omer, 13 000 habitants, dans le Nord-Pas-de-Calais; de Tulle, 15 000 habitants, en Corrèze ou encore de Castelnaudary, 12 000 habitants, dans l’Aude. Le marché de l’éclairage intelligent dans les villes petites et moyennes est en effet porteur puisque les lampes à vapeur mercure sont désormais interdites, ce qui oblige les collectivités à changer d’équipement [1].

Chaufferie à bois et panneaux photovoltaïques alimentant un réseau de chaleur monitoré à Montidider [a]

  • À Saint-Sulpice-la-Forêt en Île-et-Vilaine, commune de 1500 habitants, on surfe sur la vague marketing de la ville intelligente en s’affirmant « la plus petite ville intelligente du monde ». Surnommée la « start-up » de Rennes Métropole, cette commune a mené un programme d’optimisation énergétique de ses bâtiments municipaux (pilotage de la consommation en temps réel pour une réduction de 20% de la consommation d’électricité/gaz/eau). Un programme à 20 000€ pour la commune, qu’elle amortira en 5 ans. Une délégation de Shanghai a déjà visité le dispositif [2].

Vidéo de présentation de « la plus petite smart city du monde » [b]

  • Aubinges, dans le Cher, 250 habitants, a été accompagnée par Vinci pour mettre en place en 2016 une solution d’éclairage intelligent. Concrètement, tous les lampadaires du village sont équipés de LED à détection de mouvement qui s’éclairent donc sur le passage d’un piéton, d’un cycliste ou d’une automobile.
  • Saint-Apollinaire, une commune bourguignonne de 300 habitants, a adopté une démarche d’open data et travaille actuellement sur les moyens les plus intelligents de valoriser ses données [3].
  • Chooz, 750 habitants, dans les Ardennes, accueille une centrale nucléaire sur son territoire. La commune en a profité pour mettre en place un système d’autopartage. Une dizaine de véhicules électriques Renault Zoé sont ainsi proposés aux collaborateurs de la centrale [1].

Véhicules électriques en autopartage à la centrale de Chooz [c]

  • Le Pradet, 10 000 habitants, dans le Var vient de lancer un grand chantier de transformation numérique : application mobile participative, wifi public dans les parcs et places de la commune, éclairage LED et guichet administratif unique en ligne.

En Amérique du Nord également cette tendance se confirme:

  • Olds, dans la province de l’Alberta au Canada, qui compte 9000 habitants, perdait plus d’un tiers de son eau potable à cause de fuites dans les canalisations. La mise en place de capteurs intelligents détecteurs de fuites lui a permis un retour sur investissement immédiat.
  • Ketchum, dans l’Idaho aux Etats-Unis d’Amérique, compte 2 700 habitants et a installé des feux de signalisation solaires et à détection de piéton ou automobile en centre-ville. De plus, la commune a investi dans un projet d’irrigation intelligente lié à des capteurs météorologiques présents dans le sol qui peuvent être contrôlés à distance. Cette dernière installation devrait permettre une réduction de 20 à 60% de la consommation d’eau selon la période de l’année.

 

Redéfinir la ville intelligente

Ces exemples questionnent en réalité la définition même de la smart city : une ville est-elle intelligente dès lors qu’elle a lancé une démarche de ville intelligente dans l’un de ses quartiers ? L’est-elle si par sa réorganisation complète elle a réussi à gérer ses ressources de manière plus efficace et à améliorer la qualité de vie de ses habitants ? Les deux cas sont valides. Dans le premier cas : l’expérimentation sur un territoire de taille réduite permet de mieux préparer une généralisation à l’ensemble du territoire. Dans le second cas, que la ville soit grande ou petite, elle suit cette idée maîtresse selon laquelle des élus locaux, en partenariat avec de nombreux acteurs innovants, utilisent les technologies émergentes afin de tirer le maximum de leurs budgets limités, d’accélérer la mise en place de nouvelles solutions digitales et de faire croître leurs économies locales [4].

Un marché important et de nouveaux business models

Les collectivités de taille petite ou moyenne disposent de fait d’un budget plus restreint : elles sont donc plus facilement intéressées par toute solution permettant d’optimiser leurs dépenses tout en améliorant la qualité de vie. Par les partenariats public-privé, la recherche de fonds européens, nationaux ou régionaux, ces collectivités parviennent souvent à réaliser les projets souhaités et obtiennent des retours sur investissement rapides. L’ADEME, sur demande du Ministère du Développement Durable, a par exemple subventionné 45% des projets de maîtrise de la consommation énergétique de 50 communes de moins de 2000 habitants [1]. Preuve des économies rapidement réalisées, la baisse des budgets de maintenance ou d’énergie dépasse souvent les 20% dans les projets de monitoring intelligent (capteurs connectés pour le chauffage, l’eau, les déchets ou l’éclairage).

Le marché des small smart cities est donc important, particulièrement en France où 98% des communes comptent moins de 10 000 habitants. Des entreprises comme IBM se sont positionnées sur le sujet, affirmant même être prêtes à moduler leur facturation au nombre d’habitant et au budget des villes [5]. Ce marché important est à même de révolutionner le concept encore naissant de smart city dans son business model et dans son image. De vitrines technologiques pour mégalopoles ultraconnectées, ces projets urbains semblent aujourd’hui se recentrer sur des services intelligents pour des collectivités désireuses d’optimiser leur qualité de vie en maîtrisant leur budget.

 

 

 

[1] Smart city versus stupid village, Caisse des Dépôts et Consignations, Septembre 2016

 

[2] http://www.latribune.fr/regions/bretagne/saint-sulpice-la-foret-la-smart-city-rurale-626030.html

 

[3] http://www.caissedesdepotsdesterritoires.fr/cs/ContentServer/?pagename=Territoires/Articles/Articles&cid=1250278876156&nl=1

 

[4] https://www.brookings.edu/research/getting-smarter-about-smart-cities/

 

[5] http://www.journaldunet.com/economie/services/1175931-prestataires-smart-city-petites-villes/

Images:

[a] http://www.territoires-energie-positive.fr/var/res-league/storage/images/clu_euro/national_leagues/clu_fran/communities/best-practices/montdidier-une-regie-communale-acteur-de-la-politique-energetique/45013-6-eng-GB/montdidier-une-regie-communale-acteur-de-la-politique-energetique_articlelarge.jpg

[b] https://vimeo.com/204999950/03aa2ee4f2

[c] www.connaissancedesenergies.org/sites/default/files/image_article/voiture-electrique-et-nucle.jpg

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