Réussir des transformations positives dans un contexte de transition énergétique ?

Le 13 mai dernier, Wavestone coorganisait avec Intermines une table ronde sur les transformations positives. Xavier METZ, Partner chez Wavestone, animait le débat et recevait Sylvie JEHANNO, présidente-directrice générale de Dalkia, et Philippe SILBERZAHN, professeur à l’EM Lyon Business School.

Deux intervenants passionnés d’innovation et de transformation

image conf 1En introduction de la table ronde, Xavier METZ, souligne les points communs des deux invités. Ils partagent une passion pour l’innovation, la transformation et la conduite du changement. Ils sont également, tous les deux, atypiques dans leur environnement. Sylvie JEHANNO dirige une grande entreprise des services énergétiques où seulement 14% des collaborateurs sont des « collaboratrices ». Philippe SILBERZAHN, quant à lui, doit la singularité de son profil à son expérience entrepreneuriale et nourrit ses livres, dont le dernier co-écrit avec Béatrice Rousset Stratégie Modèle Mental, de ses diverses expériences et recherches.

Des changements profonds et rapides, moteurs des transformations…

Dans un contexte de profonde évolution, Sylvie JEHANNO rappelle trois éléments qui incitent Dalkia à se transformer. La première raison est évidemment la transition énergétique. D’ailleurs, Dalkia s’est historiquement positionné en acteur de cette transition en développant la cogénération. De la même manière, la révolution numérique bouleverse aujourd’hui les codes et les organisations. La dirigeante de Dalkia fait remarquer que le « numérique est partout » que ce soit dans l’exploitation et la maintenance des installations énergétiques, dans l’exploitation des données ou encore dans le développement des Smart Grids. Enfin, la troisième raison, et non la moindre, est l’évolution des attentes clients. Ils aspirent de plus en plus à la réduction de leurs émissions de CO2 mais aussi à la transparence vis-à-vis de leurs données. Elle insiste enfin sur l’importance du changement pour les salariés de l’entreprise qui y jouent un rôle clé et expriment également des attentes nouvelles.

image conf 2

Philippe SILBERZAHN rappelle que le besoin d’adaptation n’est pas nouveau. Ce qui est nouveau c’est la profondeur et la rapidité du changement. De nouveaux acteurs émergent et modifient le paysage concurrentiel des organisations. Selon le chercheur académique, les évidences d’il y a seulement quelques mois deviennent désormais caduques. Les entreprises se sont construites sur un modèle et pendant longtemps elles pouvaient s’appuyer sur leur modèle initial pour prospérer. Ce n’est plus possible. Les choses changent tellement que la capacité à faire évoluer son modèle constamment devient essentielle.

… freinés par des craintes et des représentations mentales

Bien que vitales, les transformations génèrent des craintes au sein des entreprises.

D’après Philippe SILBERZAHN, il est clair que la volonté de se transformer est bien là. Elle est notamment matérialisée par des plans de déploiement clairement formalisés. En dépit de cette prise de conscience, les intentions du management se heurtent aux résistances aux changement. Il explique que les modèles d’entreprise, qui ont fonctionné et qui fonctionnent aujourd’hui, sont considérés comme des évidences et ne sont pas remis en cause. En guise d’exemple, il mentionne l’entreprise Kodak, qui, bien qu’ayant inventé la photo numérique, ne l’a pas ou très peu développée car elle fut bloquée par son modèle mental. Ainsi, les organisations peuvent restées prisonnières de leurs modèles. Ce qui a fonctionné à l’époque, ne convient plus aujourd’hui car le monde change, « il change plus vite et plus qu’avant » selon lui. En somme, le principal frein au changement est le modèle mental dans lequel nous restons bloqués.

Pour illustrer cette résistance au changement, Sylvie JEHANNO cite Sénèque : « ce n’est pas le changement qui fait peur aux gens, mais l’idée qu’ils s’en font ». Il y a une réelle appréhension de l’inconnu, une crainte que le travail de l’employé et sa manière de l’exercer soit totalement bouleversée. C’est le syndrome du « c’était mieux avant » et la peur de l’inconnu, de ne pas être capable et de perdre ses repères.

Transformer l’entreprise… et le monde, à l’instar des entrepreneurs

La présidente-directrice générale de Dalkia relève plusieurs leviers de transformations majeurs. Elle insiste dans un premier temps sur la nécessité de partager une vision avec l’ensemble des collaborateurs de l’entreprise. Cette vision doit être mobilisatrice pour les collaborateurs et répondre aux enjeux de la planète. Ainsi, dans le contexte de lutte contre le réchauffement climatique, Dalkia se positionne aux côtés de ses clients pour accélérer leur performance énergétique durable et se fixe un objectif ambitieux de 50% d’énergies renouvelables dans son mix énergétique d’ici à 2022.  Ensuite, l’équipe qui entoure le dirigeant d’entreprise est une des clefs du succès, et au-delà, l’ensemble des managers. Leur rôle est décisif pour communiquer et accompagner les salariés. Ils doivent leur permettre de changer de regard, de prendre des initiatives, d’exprimer leurs talents pour qu’ils soient en capacité de mettre en mouvement l’entreprise et d’avancer vers la cible. Ainsi, les équipes doivent être au cœur des projets. C’est particulièrement le cas pour les chantiers numériques qui transforment les façons de faire et où les techniciens sont en première ligne.image conf 3

Philippe SILBERZAHN apporte un éclairage complémentaire. Il questionne la représentation selon laquelle la stratégie est déterminée par la direction générale et ensuite exécutée par le management. Le chercheur évoque notamment les disruptions des géants du Web, qui n’avaient pas de vision précise préalable. La vision émerge progressivement des actions entreprises. L’organisation ne doit pas être considéré comme une machine mais un organisme vivant. Elle n’existe que si elle se développe au sein d’un réseau de parties prenantes. Il revient sur le rôle central du modèle mental qu’il faut sans cesse interroger pour qu’il ne nous empêche pas de nous transformer. Il rejoint Sylvie JEHANNO sur le rôle central des managers. Transformer les modèles devient une compétence fondamentale du management dans un monde sans cesse en mouvement. Ce que nous pouvons apprendre des entrepreneurs au-delà de leur capacité d’innovation, ajoute-t-il, c’est leur capacité à transformer le monde, c’est-à-dire à transformer nos modèles mentaux. Il cite Airbnb qui nous a fait accepter l’idée d’accueillir un étranger dans notre salon.

Enfin, les deux intervenants s’accordent sur la valeur de la diversité, vecteur indispensable des transformations positives. Cette multi-diversité des équipes nourrit les transformations, la capacité à innover et permet de ne pas s’enfermer dans un modèle.

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

Back to top