Cela a été l’un des événements de la rentrée. Du 24 au 26 août 2019, Biarritz a accueilli les chefs d’Etat du G7 et leurs délégations. L’Elysée avait souhaité mettre à l’ordre du jour des discussions le réchauffement climatique et la manière dont les pays pouvaient continuer à se mobiliser. Au-delà du contenu des échanges et des engagements politiques, le Président Emmanuel Macron avait également demandé que soient mis en place au sein du sommet des solutions concrètes et exemplaires de production d’énergies renouvelables locales.
C’est ainsi que le groupe ENGIE s’est mobilisé pour proposer aux équipes organisatrices un ensemble de services et de briques s’inscrivant dans cette philosophie. L’une des actions les plus visibles a été la mise en place, en un temps record, d’un champ photovoltaïque à proximité de la zone où se tenait le sommet. Un défi pour l’énergéticien qui a en plus fourni gracieusement d’autres solutions à la ville de Biarritz dans le cadre d’un mécénat de compétences. ENGIE a ainsi installé plusieurs bancs solaires dans les rues de la ville, mis en service 200 vélos hydrogène, déployé des groupes électrogènes fonctionnant à l’huile de colza et des micro-installations de productions solaires.
Quelques chiffres clés :
- 200 vélos hydrogène loués par ENGIE et mis en libre-service
- 12 groupes électrogènes de secours fonctionnant à l’huile de colza
- Concernant le champ photovoltaïque éphémère :
- 4 rangées de modules fixés sur des supports ancrés dans le sol
- 800 panneaux (soit 1300m²) étalés sur 3000m² de superficie
- Près de 10.000 kVA de production
- 8 jours de montage et 4 jours de démontage
- Plus de 200 K€ d’investissement
Afin de mieux comprendre comment le dispositif a été pensé en amont et déployé, nous nous sommes entretenus avec François LEBRETON, Chef de produits solaires chez ENGIE Entreprises & Collectivités, qui a été en charge de cette opération.
Wavestone : Pouvez-vous nous donner quelques repères sur le champ photovoltaïque que vous avez installé dans le cadre du G7 ? Comment avez-vous préparé les différentes étapes ?
François LEBRETON : Tout cela s’est fait assez vite. L’Elysée nous a prévenu au tout début de l’été que notre proposition de soutien en matière de production locale était retenue. Nous avions eu des échanges préalables en début d’année mais qui n’avaient pas été conclusifs. Le « cahier des charges » de l’Elysée visait à mettre en avant les énergies vertes locales. Nous avons donc eu l’idée d’alimenter les consommations des trambus électriques et la salle de presse avec un champ solaire.
Nous avons également proposé d’équiper le centre-ville de Biarritz avec des bancs « solaires ». Ceux-ci existent déjà dans certaines villes en France, telles que Cannes, Fréjus, Montbéliard et Les Sables-d’Olonne. Ces bancs, que l’on pourrait qualifier de « hub », servent certes à s’asseoir, mais également de point de recharge pour petits appareils électroniques ainsi que de bornes Wifi. Notre objectif en proposant ces bancs était de rendre le solaire accessible, visible et concret auprès du grand public.
Dans le cadre du mécénat, nous devions alimenter le G7 avec l’énergie la plus verte possible pour en faire un sommet certifié ISO 20121[1] avec un impact carbone le plus faible possible. Notre leitmotiv a été de faire appel au maximum à des entreprises et des produits français.
Wavestone : Aviez-vous déjà eu l’occasion de mettre en œuvre un parc photovoltaïque éphémère à cette échelle ? Y a-t-il eu une complexité spécifique liée à ce projet ? Va-t-on revoir ce genre de dispositif pour d’autres opérations à l’avenir ?
FL : C’est une première ! A ma connaissance, jamais un tel parc photovoltaïque n’avait été monté dans ces conditions en France, voire dans le monde. Il faut savoir qu’en France, le délai normal pour obtenir des modules, est d’un mois et demi minimum, compte tenu de la tension sur le marché, particulièrement pour les modules d’origine française du fait de leur meilleur bilan carbone.
C’était donc un vrai défi de se procurer les composants dans un laps de temps aussi restreint ! Néanmoins, lorsque j’ai contacté nos fournisseurs, ils ont tout de suite répondu à l’appel et ont tout fait pour tenir les délais et livrer le matériel en temps et en heure, ce qui relève de l’exploit ! En un mois et demi, nous sommes donc parvenus à valider l’obtention du matériel, le commander, puis procéder à l’installation du champ. Celui-ci a d’ailleurs été construit comme s’il avait vocation à être définitif. L’objectif était de montrer qu’il était possible en un mois et demi d’obtenir les autorisations et de réaliser un champ solaire de 240 kVA en France. Le fait que nous soyons juste en dessous des seuils de 250kVA a facilité les démarches administratives d’installation.
Wavestone : Concrètement, comme le champ a-t-il installé ?
FL : Le parc a été installé au sol avec une technique de micropieux afin de ne pas faire de trous trop importants dans l’espace mis à notre disposition et que celui-ci n’en garde aucune trace, à l’issue du G7. Nous avons ainsi disposé quatre tables (rangées de modules fixés sur des supports). Deux tables ont servi à alimenter la halle d’Iraty dans laquelle travaillaient les journalistes et deux ont servi à alimenter les trambus électriques qui transportaient les participants à l’événement. Au total, ce sont presque 10 000 kWh qui ont été générés par cette centrale provisoire.
Wavestone : Comment le travail de pré-étude a-t-il été mené ?
FL : ENGIE a réalisé le travail de pré-étude en s’appuyant sur son réseau de partenaires. Un vrai travail d’équipe. Ensemble nous avons construit et validé la solution. Celle-ci a d’ailleurs évolué avec le temps car nous avons implanté le champ à proximité d’un aéroport. Ainsi, la DGAC[2] nous a demandé de modifier l’orientation des panneaux pour éviter tout éblouissement des pilotes dans la phase d’atterrissage. L’enjeu de cette opération était véritablement de prouver le savoir-faire français et de démontrer aux pouvoirs publics que lorsqu’ils facilitent les choses, on peut faire ce qui paraît parfois impossible.
Wavestone : La Ville de Biarritz vous a-t-elle aidé dans ce projet ?
FL : Oui, sans eux nous aurions eu beaucoup de mal à mener à bien ce projet. Les services de la Ville de Biarritz ont tout fait pour que ce soit un succès. Ça a été un vrai travail de co-construction. C’est important de le souligner car ce n’est pas toujours le cas dans ce genre de projet de construction de champ solaire. Il faut parfois faire face à quelques barrages des services de l’Etat, par exemple.
Wavestone : Quel est l’avenir de cette structure ?
FL : L’intégralité du matériel a été récupéré et sera réutilisé sur d’autres sites ENGIE. Néanmoins, je pense que ce matériel sera réutilisé sur des installations définitives pour éviter de trop le transporter. En revanche, tout cela nous a donné une idée d’innovation : nous allons développer une solution avec nos partenaires français, plus rapide et pratique à déployer. Nous travaillons donc actuellement sur une solution avec pose au sol dépliable et repliable très rapidement.
Wavestone : Comment s’est passée l’inauguration de cette installation ?
FL : Il y a eu un fort intérêt des pouvoirs publics nationaux et régionaux mais surtout de la presse. Cela a permis d’acculturer les habitants de la région à l’énergie solaire et de montrer qu’elle est à la portée de tous et pas uniquement réservée aux entreprises. C’était la première installation d’autoconsommation éphémère, et cela a vraiment suscité l’intérêt des gens.
Wavestone : Pour conclure, pouvez-vous nous parler des bancs solaires installés à Biarritz ?
FL : Il y a eu une certaine effervescence autour des bancs. Un des élus de la ville, souhaitant faire un trait d’humour, a écrit un tweet en indiquant qu’il ne fallait pas s’asseoir sur les bancs aux heures chaudes de la journée. Cela a été mal interprété avec le fait qu’il pouvait y avoir des risques de brûlures, ou que la possibilité d’utiliser l’énergie produite par le banc était annihilée si des personnes étaient assises sur le banc. Il n’en est rien ! Il n’y a d’ailleurs aucun cas de blessure recensé dans les villes où ces bancs sont déjà installés. On n’est pas assis directement sur le panneau photovoltaïque. De plus, comme il y a une batterie dans chacun des bancs, on peut charger son téléphone la nuit ou lorsque le panneau solaire est occulté.
Les points à retenir :
- Le gouvernement a voulu démontrer qu’on peut concilier la parole et les acteurs en matière de transition énergétique
- Le sommet du G7 a permis au groupe ENGIE de montrer le savoir-faire français en matière de production d’énergie renouvelable locale
- La mobilisation d’ENGIE s’est traduite par un appui technique et un mécénat de compétences
- Concernant le champ photovoltaïque éphémère :
- Le projet a montré qu’avec l’engagement et la mobilisation de tous les acteurs, de tels projets pouvaient voir le jour en des temps records
- La mise en lumière de l’opération a généré un fort intérêt local
- Ce genre d’initiative sensibilise le grand public au solaire
- Cette initiative pourrait être réitérée à l’avenir
[1] La certification ISO 20121 vise à inscrire les événements dans une logique de développement durable. Elle assure ainsi une production de déchets raisonnée et une utilisation des ressources locales viable.
[2] Direction générale de l’aviation civile.
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