Le Plug & Charge : une nouvelle solution d’authentification et de facturation sécurisée au service de la recharge des véhicules électriques

Le Plug & Charge est l’un des leviers clefs pour accélérer le développement de la mobilité électrique et donc faciliter la transition énergétique dans les transports. Il est d’ailleurs au cœur de la réglementation AFIR, publiée le 25 juillet 2023 par le conseil de l’Union Européenne. Cette réglementation définit de nouvelles orientations pour soutenir les transformations du secteur de la mobilité avec des objectifs de déploiement de bornes de recharge rapides tous les 60km sur les principaux axes routiers de l’Union Européenne et de simplification du paiement de la recharge pour les utilisateurs de ces bornes. Le Plug & Charge soutient cet objectif de simplification et, en ce sens, suscite l’intérêt des acteurs de l’écosystème de la mobilité. Par exemple, Google Maps a annoncé produire une fonctionnalité permettant d’identifier la localisation des bornes Plug & Charge.

Le Plug & Charge est une technologie innovante, utilisée pour simplifier le processus de recharge des véhicules électriques. Il permet au véhicule de s’authentifier et communiquer directement avec la borne de recharge sans utiliser un badge ou une application. Une fois le véhicule branché, aucune autre intervention n’est nécessaire de la part du conducteur pour déclencher la recharge, ce qui fluidifie son expérience utilisateur. Le Plug & Charge, permet également de renforcer la sécurité des échanges au cours du processus de recharge.  

Ces différents avantages participent donc à renforcer l’attractivité et la facilité d’usage des véhicules électriques et justifient le déploiement du Plug & Charge à grande échelle. Cet article s’intéresse aux origines du Plug & Charge, à la technologie sous-jacente et aux enjeux liés à son déploiement auxquels sont confrontés les acteurs de la mobilité.  

Les origines du Plug & Charge 

Le Plug & Charge est un des cas d’usages décrits dans la norme ISO 15118 (“Road vehicles – vehicle to grid communication interface”) ayant pour objectif de décrire les protocoles de communication entre un véhicule électrique et une borne de recharge à des fins de standardisation. Cette norme vise à faciliter l’interopérabilité entre les différents composants (présentés dans la partie 3) impliqués dans le processus de recharge au niveau des véhicules électriques, des infrastructures de recharge et des systèmes de gestion de l’énergie.  

La norme ISO 15118 met également l’accent sur la sécurité des échanges entre le véhicule électrique et la borne de recharge. Plus précisément, elle aborde les notions d’authenticité – renvoyant à la vérification de l’identité des acteurs impliqués dans le processus de recharge – et de confidentialité –renvoyant à la protection des données échangées lors de la recharge.  

Aussi, le Plug & Charge simplifie l’expérience de la recharge pour les utilisateurs de véhicules électriques en éliminant la nécessité d’une identification externe. L’utilisateur branche simplement le câble à une borne pour lancer la recharge de son véhicule. Celui-ci étant identifié comme lui appartenant, la facturation est déclenchée directement, sans aucune autre action manuelle de sa part pour effectuer le règlement.

Le RFID et l’Autocharge : deux autres solutions d’authentification et de facturation utilisées pour la recharge des véhicules électriques

Le Plug & Charge s’ajoute à d’autres solutions plus ancrées dans le paysage de la recharge électrique.    

La technologie RFID (Radio Frequency IDentification), fréquemment utilisée pour des solutions de recharge plus classiques, comporte des étapes supplémentaires dans le parcours utilisateur d’un conducteur chargeant son véhicule électrique. Elle implique de brancher son véhicule à une borne, puis de s’y authentifier via un badge ou une application smartphone pour déclencher la session de recharge. La puce contenue dans le badge permet d’identifier le propriétaire du véhicule et le contrat souscrit pour utiliser la borne. A titre d’exemple, cette technologie est comparable à celle utilisée pour produire les étiquettes “antivol” pour certains magasins de prêt-à-porter. Enfin, le badge RFID doit être compatible avec la borne utilisée, ce qui n’est pas systématiquement le cas.  

Pour simplifier le parcours de l’utilisateur, d’autres technologies ont été mises en œuvre par les opérateurs de la recharge, afin de déclencher cette dernière dès le branchement du véhicule à une borne.  

L’Autocharge est une première solution permettant aux conducteurs de déclencher immédiatement la recharge à la suite de la connexion à une borne. Cependant, elle ne peut être mise en place que sous certaines conditions : les véhicules doivent être techniquement compatibles avec la solution (par exemple, en disposant de prises CCS (Combined Charging System) et s’être identifiés au préalable auprès d’un CPO (Charging Point Operator) via une inscription réalisée par l’utilisateur lors d’une première charge. La forme de cet identifiant diverge selon les constructeurs automobiles.

Dans le cadre de l’Autocharge, la plupart des véhicules électriques ont recours à un identifiant MAC (Media Access Control). Une fois identifié auprès d’un CPO, le véhicule a accès à une recharge immédiate sur tous les points de charge via à un protocole de communication permettant à un système de gestion des bornes de recharge dans le cloud de reconnaître l’identifiant du véhicule et de l’associer à une autorisation d’accès au réseau. Malgré sa facilité d’utilisation pour les propriétaires de véhicules électriques, le système de l’Autocharge reste sensible à des cyberattaques visant la modification ou l’imitation des identifiants des véhicules.

L’utilisation de certificats : la technologie différenciante du Plug & Charge

Une autre solution développée est celle du Plug & Charge, qui s’appuie sur la norme 15118 et vise à simplifier la recharge pour les conducteurs de véhicules électriques, tout en renforçant la confidentialité, l’intégrité et l’authenticité des échanges entre la borne et le véhicule pendant la recharge. 

Cette solution repose sur la mise en œuvre d’un protocole de communication basé sur des certificats numériques déjà largement éprouvé dans le domaine de la cybersécurité où il est notamment utilisé pour sécuriser les connexions sur les sites web via les navigateurs. 

A l’inverse de la technologie RFID et de l’Autocharge, l’authentification avec le Plug & Charge repose sur l’utilisation de ces certificats qui permettent à la borne, à la voiture et au contrat avec un fournisseur de service de mobilité (electric Mobility Service Provider ou eMSP) de s’identifier mutuellement (principalement avec le SECC certificate, le provisionning certificate et le contract certificate).

Schéma explicatif du processus de la recharge électrique d'un véhicule

Schéma Wavestone

Le point de vue de nos experts cybersécurité Wavestone 

Dans un premier temps, les certificats permettent au véhicule d’identifier et authentifier la borne et de mettre en place une connexion sécurisée en établissant une session TLS (Transport Layer Security). Les messages seront alors chiffrés, ce qui permet d’assurer la confidentialité des échanges entre le véhicule et la borne 

Dans un second temps, le véhicule va transmettre à la borne son certificat de contrat de mobilité, qui permet à l’opérateur de mobilité d’authentifier le conducteur et son véhicule, et enfin, d’autoriser la recharge sur la borne.  

Avec le Plug & Charge, la cybersécurité est donc renforcée par rapport au RFID. En effet, les échanges de données y sont plus sécurisés, permettant donc des transactions et authentifications plus fiables et protégées. 

 

Les acteurs de la recharge électrique concernés par le Plug & Charge 

Au-delà des propriétaires de voiture électrique qui voient leur parcours utilisateur simplifié, le Plug & Charge concerne une large variété d’acteurs : constructeurs automobiles, fabricants de bornes de recharge, opérateurs du réseau et des stations de recharge, fournisseurs d’électricité, acteurs de la technologie et de l’innovation capables de fournir et maintenir les certificats, intermédiaires de confiance, associations et organisations politiques… 

Les opérateurs des bornes de recharge font partie des premiers acteurs concernés par les réflexions et les projets de déploiement autour duPlug & Charge. A titre d’exemple, à partir de 2021, Ionity est le premier opérateur à communiquer sur son ambition de déploiement du Plug & Charge sur son réseau de bornes de recharge   en assurant une compatibilité avec plusieurs marques de véhicules. De même, en 2023, Electra annonce travailler sur la mise en œuvre de la fonctionnalité Plug & Charge au sein de son réseau. Plus récemment encore, en mars 2024, l’intérêt pour le Plug & Charge a incité Izivia, et ses partenaires SIGEIF et Mobena, à organiser une démonstration sur les bornes SIGEIF afin de favoriser un usage prochain du Plug & Charge. 

En partant de ce postulat, de nombreux constructeurs automobiles, comme BMW Group, Ford, Hyundai, Mercedes, Volskwagen, Audi et Porsche (membres du consortium Ionity), s’intéressent à l’intégration du Plug & Charge dans la conception de leurs modèles et à son déploiement.

Enfin, d’entreprises et autres groupes de travaux qui se sont emparés de travaux autour du Plug & Charge pour mieux envisager les enjeux et défis relatifs à son déploiement. C’est notamment le cas de Gireve, Hubject ou encore de l’association CharIN, fondée en 2015, qui rassemble de nombreux acteurs de l’écosystème de la mobilité, aussi bien constructeurs qu’opérateurs du réseau et des services de mobilité électrique (dont Gireve, Allego, le Groupe Renault, Volvo et Schneider Electric). 

Les défis inhérents au déploiement du Plug & Charge 

Comme expliqué précédemment, le Plug & Charge promet donc de répondre à des besoins forts en termes de rapidité et de facilité de la recharge pour les propriétaires des voitures électriques. Pour autant, son déploiement se heurte à plusieurs défis. 

Le premier d’entre eux renvoie à un défi technologique lié à la capacité de mise en œuvre et de maintien des certificats. En effet, les acteurs de la recharge électrique doivent être à même de mobiliser les ressources et compétences nécessaires pour intégrer les certificats à leurs systèmes et les renouveler régulièrement. Par conséquent, le Plug & Charge implique de prendre des décisions stratégiques quant à la modification du système d’information, au type de certificats à déployer et aux partenariats avec les différents types d’acteurs de l’écosystème de la mobilité.   

A ce défi technologique s’ajoutent des enjeux de sécurité des échanges et de protection des données. Dans un contexte où les voitures disposent de systèmes informatiques embarqués de plus en plus développés et sujets au hacking, les certificats recouvrent une importance primordiale pour sécuriser les échanges lors de la recharge. La norme ISO 15118 et ces certificats permettent de rassurer les utilisateurs et acteurs de la mobilité quant à la sécurité garantie par le Plug & Charge et facilitent son déploiement à plus grande échelle. En ce sens, l’AFIREV met en avant le fait que la norme ISO 15118 «?assure aussi une meilleure prévention de la cybercriminalité (vol d’énergie, vol d’identité, cyber vandalisme, etc.) et de protection des données des conducteurs?»1. 

L’intégration des certificats au sein des bornes de recharge, des voitures et des contrats avec les opérateurs de mobilité (ou eMSP) implique également la révision ou la mise en place de nouveaux processus organisationnels et industriels pour les acteurs de l’écosystème de la mobilité électrique. Pour permettre et pérenniser l’utilisation du Plug & Charge, ces répercussions organisationnelles doivent être prises en compte dans les stratégies de déploiement des solutions. 

Plus particulièrement, le déploiement de solutions Plug & Charge présente des enjeux importants en termes de coordination et d’interopérabilité étant donné la pluralité des acteurs de la mobilité et de leurs potentiels partenaires technologiques pour le développement des certificats. En effet, pour que les propriétaires de véhicules électriques aient accès à un réseau de bornes Plug & Charge le plus large possible, les certificats mis en œuvre par les constructeurs automobiles doivent être en mesure de reconnaître et d’échanger des informations avec les certificats des bornes et des contrats et vice-versa. C’est d’ailleurs une question dont s’est emparée l’Union Européenne à travers les travaux du Sustainable Transportation Forum 

L’avènement du Plug & Charge questionne également l’adaptation des infrastructures et véhicules existants.  A titre d’exemple, le Plug & Charge n’est possible que pour les véhicules et infrastructures dont le hardware (voiture, borne, connecteurs compatibles, système de stockage de clefs numérique sécurisé, etc.) et le software (protocoles de communication, etc.) sont compatibles. Aussi, pour embarquer la flotte la plus étendue possible de véhicules électriques, la possibilité d’intégrer des technologies Plug & Charge aux véhicules et infrastructures existants, questionne et représente un enjeu de taille. 

Enfin, le déploiement de bornes et de véhicules avec une fonctionnalité Plug & Charge est aussi dépendant des contextes politico-économiques puisqu’il représente un investissement financier de la part des acteurs de la mobilité électrique particulièrement sensibles aux contraintes ou incitations financières et légales.

Le point de vue de nos experts cybersécurité Wavestone 

Deux principaux enjeux émergent quant à l’utilisation des certificats dans le contexte de la mobilité électrique.  

Premièrement, leur déploiement à grande échelle dépend de l’établissement d’une PKI (Public Key Infrastructure). Cette infrastructure doit être gérée par des entités fiables, bénéficiant de la confiance de l’ensemble des acteurs de la mobilité électrique. Par exemple, Gireve et CharIN proposent aux acteurs de rattacher leurs certificats à cette autorité racine «V2G Root». 

Deuxièmement, il est crucial de s’appuyer sur des protocoles efficaces pour mettre à jour les certificats de contrat de mobilité dans toutes les configurations d’utilisation des véhicules. Ces protocoles doivent notamment permettre de gérer les cas suivants?: un véhicule utilisé par plusieurs conducteurs, des changements de propriétaire, ainsi que d’autres situations complexes pouvant survenir dans le cycle de vie d’un véhicule électrique. La réussite dans ces deux domaines est essentielle pour garantir la sécurité et la fluidité des recharges en Plug & Charge. 

Le Plug & Charge présente des intérêts majeurs en termes de sécurité et de facilité d’utilisation. Pour autant, son coût de mise en œuvre est supérieur à celui d’une technologie RFID et les solutions compatibles ne sont pas encore disponibles sur tous les véhicules et sur l’ensemble du territoire. Aussi, pour permettre une utilisation massive des solutions Plug & Charge, les défis et les transformations technologiques & organisationnelles décrits ci-dessus doivent être pris en compte dans leur stratégie de déploiement.

Pour aller plus loin dans la compréhension de ces enjeux, GIREVE, plateforme B2B proposant, entre autres, des services Plug & Charge, répondra à nos questions lors d’un prochain article. 

1AFIREV. (2020). Recommandations sur le déploiement de la norme ISO 15118 en France et des services associés. Dans AFIREV. https://www.afirev.fr/wp-content/uploads/2020/01/AFIREV-Livre-blanc-d%C3%A9ploiement-15118_Vf-3.pdf

Rédacteurs : Amélie Leynier, Antonin Gianella & Louise Cordonnier

 

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