Les « Corporate PPAs » : vecteurs de transition énergétique pour les entreprises … mais pas seulement !

En 2018, les Corporate PPAs (power purchase agreements), contrats liant une entreprise à un producteur d’énergie pour une période de temps déterminée, se sont établis à un niveau historique.

La croissance sans précédent des contrats Corporate PPAs « Offsite » (où les dispositifs de production d’électricité ne sont pas situés directement sur le site de l’entreprise) s’est notamment expliquée par la baisse du coût des énergies renouvelables et la volonté croissante des entreprises de décarboner leur activité.

Si les débuts sont timides en Europe de l’ouest, la révolution du Corporate PPA est bel et bien lancée aux Etats-Unis, mais également dans les pays Nordiques. Pourquoi ce phénomène prend-t-il autant d’ampleur ?

En tant qu’entreprise, pourquoi souscrire à un Corporate PPA ?  

Les Corporate PPAs lient une entreprise, aux besoins électriques définis et généralement conséquents, à un producteur d’électricité (renouvelable le plus souvent) pour une durée déterminée. S’ils séduisent un nombre croissant d’entreprises, c’est principalement grâce aux avantages financiers qu’ils leur apportent, notamment dans une perspective de forte augmentation du prix de la tonne carbone.

En effet, avec ces contrats, producteurs d’électricité et entreprises s’accordent sur un tarif d’électricité fixe pour une période donnée (10, 15, 20 ou même 25 ans). Cela permet à ces dernières de se prémunir contre la variabilité du marché et d’avoir une vision à long terme de leurs dépenses énergétiques.

En outre, ces contrats permettent aux entreprises de verdir leur mix énergétique et d’améliorer sensiblement la durabilité de leurs modèles économiques, en achetant de l’électricité verte directement au producteur. Lorsqu’elles souscrivent à un Corporate PPA, les entreprises obtiennent des garanties d’origine (G.O) de la part des producteurs d’électricité verte, lesquelles attestent de leur contribution financière au développement des énergies renouvelables. Elles peuvent ensuite valoriser financièrement ces G.O dans le calcul de leur empreinte carbone, grâce aux dispositifs de compensation carbone.

Les Corporate PPAs : une nouvelle source de financement pour les énergies renouvelables

Dans certains pays comme ceux de l’Union Européenne, les mécanismes de soutien des Etats au développement des énergies renouvelables (complément de rémunération) permettent de garantir un prix de vente au producteur d’électricité renouvelable. En sécurisant le business plan des porteurs de projets, la garantie de revenus rassure les investisseurs potentiels quant à la pérennité du projet et facilite donc le déblocage des financements.

Cependant, on semble se diriger vers une disparition progressive des subventions pour l’électricité verte. On assiste ces derniers mois à une multiplication des appels d’offres subsidy free  (c’est-à-dire sans subventions) partout à travers le monde. Un exemple récent et frappant : l’annonce du gouvernement chinois d’un appel d’offre éolien subsidy free  de 6 GW en Mongolie intérieure pour alimenter en électricité les infrastructures des Jeux Olympiques d’hiver de 2022. Dans ce contexte, les Corporate PPAs prennent tout leur sens et constituent, de fait, une garantie de revenus non négligeable pour les porteurs de projet.

Enfin, en assurant la viabilité financière des projets en développement, les Corporate PPAs réduisent la dépendance des projets aux subventions publiques, ce qui augmente leur compétitivité lors des appels d’offre publics.

 

ZOOM : L’exemple de la ferme éolienne de Tullahennel, en Irlande

La consommation d’électricité des « Data Centers », souvent très conséquente, fait l’objet de nombreuses critiques. En Irlande, par exemple, ces derniers pèsent pour 6% de la consommation électrique du pays.

En Octobre 2017, le géant Microsoft a signé un Corporate PPA d’une durée de 15 ans avec GE Renewable Energy, pour alimenter ses serveurs informatiques irlandais en électricité.

Microsoft s’est ainsi engagée à acheter la totalité de l’électricité produite par la ferme éolienne de Tullahennel, composée de 13 éoliennes GE,d’une puissance totale de 37MW.

L’entreprise ElectroRoute, également impliquée dans cet accord, sera en charge des activités de « trading » de l’électricité produite par la ferme de Tullahennel.

 2018 : une année exceptionnelle pour les Corporate PPAs

En ce qui concerne les Corporate PPAs, l’année 2018 a été celle de tous les records. Entre janvier et juillet 2018, les capacités de production d’électricité renouvelable contractualisées dans des Corporate PPAs Offsite ont représenté un volume  de 7,2 GW (gigawatts) – soit une augmentation d’environ 33% par rapport au total de l’année 2017

Cette explosion des Corporate PPAs peut s’expliquer par la conjonction de deux facteurs :

En premier lieu, la baisse nette et continue du prix des énergies renouvelables les rend de plus en plus compétitive face aux énergies fossiles. Ainsi, selon Bloomberg New Energy Finance (BNEF), le coût des panneaux solaires a diminué de 84% depuis 2010, celui des turbines éoliennes de 32% au cours de la même période.

En second lieu, de nombreuses entreprises font évoluer leur modèle économique afin de limiter leur impact sur l’environnement. Ainsi, les 161 entreprises du groupe RE100 (BMW Group, IKEA, Facebook, Apple, etc.) ont amorcé leur transition vers une consommation d’électricité 100% renouvelable. Par conséquent, un nombre croissant d’entreprises s’intéresse au modèle du Corporate PPA. Entre janvier et juillet 2018, Facebook a ainsi signé des PPAs pour un volume total de 1,1GW, dominant ainsi le classement des entreprises signataires de Corporate PPAs.

Même si le mécanisme de soutien de l’Etat aux énergies renouvelables freine le développement des Corporate PPAs en France, de grandes entreprises commencent à s’y intéresser. Ainsi, en juin 2018, la société Aéroport de Paris a annoncé qu’elle souhaitait alimenter ses trois plateformes aéroportuaires via des PPAs, et ce, dès 2020. Au même moment, la SNCF a affirmé être à la recherche de producteurs capables d’apporter jusqu’à 20% de son énergie de traction à un prix fixe pendant 10 à 20 ans, ce qui représente un volume supérieur à 1 TWh.

En conclusion, le marché mondial des PPAs est en pleine expansion et semble avoir de beaux jours devant lui. Selon les analyses de BNEF (Bloomberg New Energy Finance), les entreprises membres du groupe RE100 devront acheter environ 200 TWh additionnels d’électricité renouvelable d’ici 2030 si elles veulent respecter leurs engagements de réduction de leur empreinte carbone. Si elles venaient à s’alimenter en énergie verte en contractualisant des Corporate PPAs, cela pourrait concerner 100 GW de nouvelles capacités solaires et éoliennes. Et ce n’est qu’une goutte d’eau par rapport aux millions d’entreprises qui seront certainement amenées à questionner leur approvisionnement énergétique dans un futur proche.

Les Corporate PPAs sont plutôt plebiscités à ce jour par de grandes entreprises, notamment parce qu’ils recquièrent une capacité de projection financière sur le long, voire très long terme. Cependant, ce type de contrats pourrait jouer un rôle moteur dans le développement des énergies renouvelables au niveau local. Une SEM (société d’économie mixte) de production d’électricité renouvelable pourrait par exemple contractualiser un Corporate PPA avec des PME groupées sur une même zone industrielle, et assurer leur approvisionnement en électricité …

A suivre donc !

Mécanisme de fonctionnement d’un Corporate PPA en résumé :

 

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