Virtual Power Plants : un levier essentiel pour la flexibilité énergétique

La Virtual Power Plant (VPP) est l’infrastructure numérique opérée par un agrégateur qui permet de regrouper et piloter un ensemble d’actifs énergétiques distribués. Ces actifs peuvent être des sources de production d’électricité (parcs éoliens, centrales solaires, installations hydroélectriques, panneaux photovoltaïques et éoliennes domestiques), des moyens de stockage (batteries industrielles, batteries domestiques, batteries de véhicules électriques) et/ou des consommateurs (industries, tertiaire, particuliers) offrant un potentiel d’effacement ou de décalage de leur demande.  

La VPP repose sur une interface intelligente qui permet de collecter, analyser et exploiter en temps réel les données issues de ces actifs afin de : 

  • optimiser et prédire la production et la consommation, 
  • optimiser la vente de l’électricité sur les marchés, 
  • envoyer des ordres de modulation ou d’effacement aux actifs, 
  • offrir des services au réseau électrique (équilibrage, réserve, capacité…)

La VPP permet de répondre à la demande croissante de flexibilité du réseau électrique, une exigence devenue centrale avec la montée en puissance des énergies renouvelables intermittentes et l’électrification des usages. Selon RTE, la consommation nationale d’électricité pourrait passer de 460 TWh aujourd’hui à 580–640 TWh en 2035. Cette hausse s’explique par plusieurs dynamiques : le développement de la mobilité électrique, mais aussi les besoins croissants du secteur bâtimentaire (résidentiel, tertiaire) liés à la décarbonation des modes de chauffage et de climatisation ainsi que l’électrification progressive de procédés industriels. 

Par flexibilité, on entend la capacité du système électrique à s’adapter en temps réel aux variations de production et de consommation. En agrégeant un ensemble d’actifs (sources de production, moyens de stockage et usages consommateurs), la VPP peut piloter dynamiquement ces ressources pour maintenir l’équilibre du réseau à chaque instant. 

De plus, la Virtual Power Plants peut offrir de nombreux avantages économiques, que ce soit pour des actifs de faible ou de forte puissance, en participant aux mécanismes de flexibilité ou en optimisant la consommation, la production et la vente sur les marchés. 

Différentes applications

Il existe deux grands types de Virtual Power Plant : des VPP qui agrègent principalement des actifs industriels (production d’électricité et consommation flexible) et des VPP qui agrègent plutôt des actifs domestiques. Le tableau suivant présente différents cas concrets de Virtual Power Plant.

Tableau : Exemples de Virtual Power Plant

Des acteurs, tels que Next Kraftwerke et Statkraft, exploitent majoritairement des actifs de production industriels. En parallèle, des acteurs comme Tesla et SunRun agrègent plutôt des actifs domestiques moins puissants mais en plus grand nombre.

Certaines Virtual Power Plants fonctionnent comme des microgrids, c’est-à-dire sans connexion aux marchés de l’énergie. C’est le cas du microgrid isolé de l’Île d’Eigg en Écosse, qui coordonne panneaux solaires, éoliennes, générateurs hydroélectriques et batteries pour optimiser localement production, stockage et consommation, en appliquant des principes proches de ceux d’une VPP.

La Virtual Power Plant s’inscrit dans un contexte énergétique spécifique

Dans l’Union Européenne, de nombreuses mesures et traités ont été mis en place pour réduire les émissions de CO2 et pour soutenir le développement des énergies renouvelables (European Green Deal, Fit for 55, REPowerEU, RED I, II & III).

Figure : Production électrique annuelle dans l’UE

Des résultats sont déjà observables avec par exemple une augmentation cruciale de la génération d’électricité renouvelable.

Cependant, cette transition s’accompagne de nouvelles contraintes structurelles sur le réseau électrique, qui doit s’adapter à :

  • l’intermittence des énergies renouvelables, par nature non pilotables,
  • l’électrification rapide des usages, notamment les véhicules électriques, les pompes à chaleur ou les procédés industriels,
  • la montée des dispositifs d’autoconsommation, qui modifient profondément les flux traditionnels d’électricité (topologie du réseau inversée, baisse de la prévisibilité…).

Ces tendances accentuent le besoin de flexibilité, c’est-à-dire la capacité du système électrique à réagir rapidement et efficacement aux écarts entre production et consommation. Elle repose sur trois leviers principaux :

  • adapter la production : mobiliser ou réduire la puissance des unités de production pilotables,
  • ajuster la demande : moduler ou effacer temporairement certaines consommations.
  • stocker l’énergie : absorber les excédents en période de surplus pour les restituer en période de tension.

Or, ces leviers sont de plus en plus répartis de manière décentralisée dans le système électrique. C’est là que la Virtual Power Plant prend tout son sens. En agrégeant numériquement une multitude d’actifs hétérogènes, elle permet de centraliser leur pilotage et de les mobiliser collectivement comme une seule entité.

Cela ouvre l’accès à des gisements de flexibilité auparavant inaccessibles ou non valorisés, notamment dans le secteur résidentiel, les PME ou chez les producteurs d’énergie.

L’économie des VPP : sources et modes de rémunération

1. Comment une VPP génère-t-elle des revenus ?

Une Virtual Power Plant agrège des actifs afin de les faire participer à plusieurs marchés et mécanismes de valorisation. Les principales sources de revenus sont le stockage puis revente d’énergie, les réserves de puissance, les marchés de la flexibilité et les marchés de l’électricité (les références utilisées par la suite sont citées ici).

Voici différents points clés sur les revenus :

  • Les différentes sources de revenus ne sont pas équivalentes : certaines constituent un socle de valorisation quasi systématique, tandis que d’autres viennent en complément, de façon plus ponctuelle mais avec un potentiel de rémunération significatif.
  • Pour information, en France, sur les marchés de la flexibilité et des réserves de puissance, la rémunération provient principalement de RTE.

Un avantage clé des VPP est de permettre à des actifs de faible puissance de participer aux réserves primaires, secondaires et tertiaires, grâce à l’agrégation de puissance, indispensable pour atteindre le seuil minimal de 1 MW requis

2. Comment la rémunération est-elle distribuée ?

Il existe trois différents types de rémunération : partage des revenus, paiement à la performance et paiement forfaitaire.

Pour le cas de la VPP de Tesla, les frais de fonctionnement sont de l’ordre de 20% de la valeur générée : 80% de la marge est reversée au propriétaire de l’actif.

La donnée au cœur de la VPP

Une VPP n’existe pas sans données. Elles permettent de transformer un portefeuille hétérogène d’actifs énergétiques en une entité cohérente capable d’opérer sur les marchés de l’énergie. Différents enjeux apparaissent alors :

Conclusion

Les Virtual Power Plants constituent un formidable gisement de flexibilité. Bien que leur conception et leur exploitation soient toutefois marquées par une forte complexité technique (interconnexion d’actifs hétérogènes) et économique (modèles de rémunération, volatilité des prix, cadre réglementaire en évolution), le marché mondial connaît une croissance rapide, avec une projection estimée à 16,65 milliards de dollars en 2030 contre 5 milliards en 2024.

Cet article a présenté une multitude de concepts autour des Virtual Power Plants, mais chacun d’eux mériterait d’être exploré plus en profondeur. Pour prolonger la réflexion et creuser certains aspects de la flexibilité, vous pouvez consulter d’autres publications de Wavestone :

  • Flexibilité dans le secteur tertiaire [ici]
  • Le rôle indispensable de la flexibilité du réseau électrique [ici]
  • V2G : Les véhicules électriques, outils de la flexibilité du réseau électrique ? [ici]
  • Panorama du marché français des Energy Management Systems pour les bâtiments [ici]

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