RSE : utopie ou réalité ?

Dans la première partie de notre entretien, François d’Essertaux, le manager RSE du Groupe Colt, nous a livré sa définition de la RSE. Il nous a également présenté les différents niveaux de maturité de la RSE au sein de l’entreprise. Cette deuxième partie est consacrée aux questions de rentabilité de la RSE, de la différence de sa mise en œuvre en B2C et en B2B et enfin de son développement futur. 

Quel retour sur investissement peut-on attendre de la RSE ?

Dans notre économie de marché et pour les entreprises cotées, la RSE est en premier lieu un moyen d’influer sur la valeur de votre action. La communauté d’investisseurs « Socialement Responsables » s’attache de façon exponentielle à vos critères ESG (Environnementaux, Sociaux et de Gouvernance). Pour améliorer ces critères, des innovations RSE voient le jour.

Au-delà de ce prérequis, il y a une rentabilité plus évidente et plus aisément calculable qui correspond la plupart du temps à des opportunités de réduction de coûts. Par exemple, Colt a investi dans des programmes d’efficacité énergétique pour ses Data Centers et ses centres techniques télécoms – plus de 65% de notre empreinte carbone. En se focalisant sur le sujet sans relâche pendant 4 ans, nous avons réussi à réduire de plus de 47 GWh notre consommation d’énergie par an. Une réduction annuelle de 4,4 millions d’euros en coûts énergétiques et 16 500 tonnes d’équivalent CO2. Nos clients en profitent, réduisent eux-mêmes leur empreinte environnementale indirecte en achetant des services Colt, et l’initiative répond à une problématique omniprésente dans notre secteur. En effet la croissance d’utilisation de la technologie, entre avènement prédit du « Big Data » ou de « l’Internet des choses », engendre une consommation énergétique qui ne peut qu’augmenter. Avec elle, les prix de l’énergie et les 2-5% de l’empreinte globale que représentent les TICs. Pour autant, en utilisant les TICs, les autres industries peuvent réduire leur empreinte de 16,5%, selon le rapport SMARTer 2020.

Peut-on aussi parler d’avantages « non-financiers » à développer sa RSE ?

Il y a des avantages plus « intangible » certes. Ils sont tous liés à des objectifs de business ceci-dit. Il s’agit par exemple de l’ensemble des actions des Ressources Humaines qui améliorent les conditions des employés qui se traduit par une meilleure image de la marque employeur de l’entreprise. RSE ou RH me direz-vous ? Eh bien la RSE est souvent pilotée depuis les RH. Un autre exemple de rentabilité intangible : le bénévolat. Depuis 2009, notre initiative a permis de réaliser 20 000 heures de bénévolat dans 17 pays et plus de 40 villes, lever des fonds au bénéfice de milliers de jeunes qui en ont besoin, que notre technologie et nos compétences peuvent aider. Les bénéfices sont nombreux pour l’entreprise également : développement personnel,  valorisation du  travail au travers d’impact social fort et concret, augmentation de la satisfaction des employés, réduction du turn-over des talents…

Pourriez-vous citer des exemples concrets d’actions RSE à la rentabilité « intangible » ?

RSERécemment, nous avons lancé une campagne interne tout au long du mois de Juin qui a développé le savoir et la fierté de plus de 1 000 collaborateurs. En effet on apprend et on ressort grandi d’une action de bénévolat. Autre exemple, notre course à vélo entre Amsterdam et Francfort début Septembre, un projet préparé pendant neuf mois qui a généré 100 000 euros de donations à dix de nos associations caritatives locales, dont 18ème Zone à Paris, tout en améliorant le Leadership et les compétences de gestion de projet de 30 des 150 collaborateurs impliqués.

Ces actions RSE, dont la rentabilité en termes de chiffre d’affaires reste intangible, ont néanmoins un impact positif tant sur les enfants qui en ont profité que sur les employés. L’image de l’entreprise bénéficie aussi toujours de retours positifs. Et ceux qui tentent de traduire les résultats intangibles de leur RSE en résultat financier y trouvent leur compte, comme O2 qui a prouvé un retour sur investissement de 1,4 euro pour chaque euro dépensé.

La RSE a-t-elle un impact différent que l’on se trouve en B2B ou en B2C ?

En B2C, de nombreuses études montrent que les consommateurs ne sont toujours pas prêts à dépenser plus pour un produit dit « green » ou « responsable » immédiatement mais que leur comportement est de plus en plus influencé  par l’image de la marque – elle-même modifiée de plus en plus par les actions RSE. Un acheteur est donc de plus en plus enclin à choisir un produit qui est fabriqué par une entreprise communiquant sur ses initiatives RSE.

Aujourd’hui, quand je demande à mes clients B2B dans quelle mesure ils valorisent la RSE, ils me demandent d’être « en contrôle » sur des échelles de benchmark intelligentes comme la plateforme Ecovadis. Mais dans un appel d’offre, outre certains clients du secteur public ou ceux qui sont déjà au niveau 3 [voir notre article précédent], les actions RSE sont loin dans les priorités des acheteurs de services de technologie.

Pour autant, les tendances comportementales des acheteurs B2B suivent celles des consommateurs. Au cœur de l’acheteur B2B, il y a un être humain. Hier, l’acheteur B2B s’est mis à utiliser les réseaux sociaux au même titre que les particuliers. Les entreprises ont vu l’opportunité de business et investissent en stratégies marketing digitales. Demain,  à mesure que l’acheteur B2C, comme vous et moi, prête plus d’attention aux éléments RSE d’un produit, l’analogie se vérifiera par un essor des critères RSE dans la demande des acheteurs B2B, lié a une clarté plus avérée des retours sur investissement RSE tangibles et intangibles que nous évoquions, avec pour chef de file la clarté de l’impact sur la valeur de l’action en bourse.

Quel avenir pour la RSE ?

De nombreuses études montrent que le consommateur n’achète plus tant ce qu’une entreprise « produit » mais plutôt « pourquoi » elle le fait. Je pense que la RSE est une activité qui va prendre de plus en plus d’ampleur dans les années à venir. Ne serait-ce que pour des raisons économiques mais aussi à cause des évolutions de la loi et du marché du travail. Coté loi, le gouvernement Indien vient d’obliger bon nombre des entreprises présentes de dépenser 2% de leurs profits en RSE. Aura-t-on de telles mesures un jour en Europe ? Coté  « génération Y » (née entre 1980 et 2000), les jeunes n’ont pas les mêmes attentes que leurs ainés. Dans la hiérarchie de leurs souhaits, après le salaire, la stabilité et l’autonomie, ils accordent beaucoup  plus d’importance au fait que leur futur employeur leur permette d’avoir un impact positif dans le monde. Selon une étude PwC, 86% se disent même prêts à quitter leur job si la RSE de leur entreprise ne remplissait pas leurs attentes. Or en 2020, les membres de cette génération représenteront 50% de la force de travail. On peut imaginer que les entreprises qui souhaitent attirer les futurs talents qui formeront leur capital humain doivent dès aujourd’hui anticiper cette transition et se mettre à investir dans la RSE. Les entreprises sont d’ores et déjà face à ce choix : subir demain ou anticiper aujourd’hui.

En somme, la RSE est une activité qui tend à prendre de l’importance pour les entreprises. Si sa rentabilité n’est pas toujours directement chiffrable, ses effets sont eux biens réels sur l’environnement et la société en générale. Avec la transformation des comportements des consommateurs et du marché du travail qui s’opère, certes, lentement les entreprises doivent dès aujourd’hui prendre les devants et s’adapter pour répondre aux attentes de demain.

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