[Interview] – Flexcity, la startup de la flexibilité du réseau électrique

Qui est Flexcity ?

Flexcity est une startup qui a rejoint le groupe Veolia en 2019, son offre consiste principalement à valoriser la flexibilité électrique de ses clients BtoB. Pour ce faire, Flexcity s’appuie sur une forte expertise technologique, notamment en IoT, en disposant de ses propres équipes R&D pour le développement de solutions de communication et d’analyse de données. L’entreprise met à disposition de ses clients la « Flexcity box » permettant de piloter à distance les différents leviers de flexibilités en fonction du marché de l’électricité et du réseau électrique.

Notions à connaitre

Flexibilité

On entend par flexibilité la capacité à assurer l’équilibre à court terme entre offre et demande d’électricité. Les sources de flexibilité sont diverses et s’appuient sur différentes technologies telles que : la production thermique pilotable (gaz, fioul, groupe électrogène), énergies renouvelables, stockage mais aussi effacement. Ces sources de flexibilités participent à des appels d’offres et mécanismes de marché permettant de les valoriser par le gestionnaire de réseau de transport (ou de distribution dans une moindre mesure), on peut citer parmi eux : les réserves (primaire, secondaire, tertiaire), le MECAPA, le mécanisme d’ajustement, le NEBEF…etc. Pour plus d’informations, consulter le site de RTE.

Effacement 

L’effacement ou effacement de consommation électrique résulte de l’action de piloter à la baisse sa consommation d’électricité afin d’équilibrer le réseau en cas de forte demande d’électricité ou d’une offre (production/injection) insuffisante. Exemple : un industriel qui choisit de diminuer volontairement sa consommation en échange d’une rémunération. Cette rémunération est calculée à partir des mécanismes de valorisation tels que : le mécanisme d’ajustement ou le NEBEF.

Gestionnaire de réseau de transport (RTE en France)

Aussi appelé TSO (Transmission System Operator), il est l’opérateur garant du bon fonctionnement et de la sûreté du réseau de transport d’électricité. Il est notamment chargé d’entretenir et de développer le réseau pour assurer l’équilibre entre offre et demande.  D’où son fort intérêt pour les sources de flexibilités qu’il rémunère par les mécanismes de valorisation cités précédemment.

Rencontre avec Adrien Doré, Flexcity

Curieux d’en savoir plus, nous sommes allés à la rencontre d’Adrien Doré, Directeur de Flexcity sur la zone France et Italie. L’agrégateur de flexibilités compte aujourd’hui un effectif d’une cinquantaine de collaborateurs répartis sur différents pays européens : France, Belgique, Pays-Bas, Italie et bientôt Espagne.

Pouvez-vous nous rappeler brièvement le parcours de Flexcity et le contexte de votre intégration au groupe Veolia en 2019 ?

Fruit de la création de Actility en 2011, revendue à Veolia en 2019, Flexcity est un pure player de la flexibilité. Sa principale activité consiste à proposer et piloter des solutions de valorisation de flexibilité. Flexcity détient un portefeuille de flexibilité évalué à 1 GW (l’équivalent d’une centrale nucléaire) et est présente sur l’intégralité des services de flexibilités. L’entreprise travaille en collaboration avec les TSO (Transmission System Operator, RTE en France), les services systèmes, les réserves lentes et rapides mais aussi : MECAPA, NEBEF et Mécanisme d’ajustement.

Quelle est votre proposition de valeur, qu’est-ce qui vous différencie de vos concurrents ?

L’IoT est l’un des principaux savoir-faire d’origine de Flexcity, c’est pourquoi l’entreprise se distingue par sa capacité à valoriser des sources de flexibilités diffuses (principalement effacements diffus). Concrètement cela consiste à construire les infrastructures IT nécessaires et les algorithmes permettant de valoriser les capacités provenant d’assets variables. Ces assets sont en général de faible puissance et répartis sur tout le territoire d’où la difficulté d’adresser techniquement les différents points. Ce à quoi répond Flexcity par ses solutions IoT.

Fig 1 : Flux financiers, de données et d’électricité échangés par Flexcity et les acteurs de flexibilités

Quel est votre business model ? Voyez-vous des évolutions possibles de ce business model en fonction des nouvelles tendances ?

Initialement le business model était surtout orienté par le cahier des charges émis par RTE. La proposition de valeur consistait principalement à chercher des capacités à activer régulièrement sur le réseau en tenant compte de l’effet rebond et en veillant à ne pas sous effacer ou sur effacer. Ces capacités sont plus précisément destinées à participer aux mécanismes proposés par le GRT (Gestionnaire de réseau de transport, RTE en France) : réserve primaire, secondaire et tertiaire. Il est question ici de flexibilité « explicite ». L’acteur participant aux mécanismes est rémunéré pour avoir mis à disposition ses capacités (de production ou d’effacement) à la manière d’une « assurance » pour le réseau en cas de déséquilibre.  

Fig 2 : Activation des réserves primaire, secondaire et tertiaire en cas de déséquilibre de l’offre et la demande (déviation de fréquence) (source RTE)

Néanmoins, on constate aujourd’hui une évolution du business model qui tend vers la valorisation d’effacements diffus (capacités d’effacement de faible puissance et réparties géographiquement). Ce levier de flexibilité a l’avantage de représenter un coût d’opportunité assez faible pour le client.

Un autre shift du business model est le changement qui consiste à plutôt valoriser le service rendu au réseau en temps réel ou le jour même, non pas en répondant à un appel d’offre RTE mais par la vente sur le marché au prix Spot. Exemple : un industriel vend directement son énergie effacée à un fournisseur tel que Alpiq ou EDF. Il s’agit ici d’une flexibilité dite « implicite » qui valorise plutôt l’énergie activée ou effacée sur le réseau à travers des mécanismes tels que le NEBEF (Notification d’Echanges de Blocs d’Effacement).  Cette seconde catégorie est plus orientée marché comparée à la flexibilité explicite qui est plus « assurantielle ». A terme, cette catégorie permettra une rémunération beaucoup plus intéressante pour les différents acteurs.

Quels sont selon vous les leviers de flexibilités et les mécanismes de valorisation les plus prometteurs ou ayant une bonne marge de progression en France et en Europe ? (Développement du stockage, vehicle to grid…)

Nous avons identifié un certain nombre de leviers ayant un grand potentiel. Tout d’abord, la valorisation des petits assets qui est notre cœur de métier, nous y croyons depuis plusieurs années. On peut citer ensuite le développement du stockage qui sera assez exponentiel (notamment en le valorisant avec les services systèmes avec une bonne rémunération à la clé). Un autre gisement à développer est celui des bornes de recharge à travers le vehicle to grid mais pas seulement, il y a aussi la modulation de vitesse de rechargement pour tenir compte des contraintes du réseau. D’autre part, il ne faut pas oublier que la plus grande source de stockage aujourd’hui c’est l’eau (Les stations STEP représentent actuellement en France 4,2 GW installés contre 0,5 GW pour les autres types de stockage). Il est également possible de valoriser le stockage dans de plus petits réservoirs (exemple : stations d’épuration) en exploitant le même principe (qui consiste à convertir l’énergie potentielle de l’eau en énergie électrique). Les réservoirs d’eau ne sont pas obligés d’être remplis à 100%, il y a une question d’optimisation entre le stockage en eau et les besoins en électricité. Enfin, le secteur du bâtiment est également un gisement de flexibilité prometteur mais encore peu utilisé.

Quels freins identifiez-vous au développement des flexibilités ? (Congestion du réseau électrique, cybersécurité, manque de gisement de flexibilités, besoins en compétences techniques…)

Le frein principal au développement des flexibilités est l’adressage technique, en effet, il n’est pas aisé de relier des petits sites isolés (bornes de recharge, petits bâtiments) à la plateforme de l’agrégateur. La généralisation de l’IoT sera déterminante pour répondre à cette problématique. De plus, il ne s’agit pas seulement de proposer une solution technique mais aussi d’assurer une bonne rentabilité économique. On peut parfois constater un manque d’incitation financière, peut-être un manque de volonté des pouvoirs publics. Les flexibilités sont pourtant intéressantes car une fois installées, elles peuvent fonctionner sur une longue période.

Pour aller plus loin

Pourquoi la flexibilité des réseaux électriques est-elle en train de devenir un enjeu majeur ?

V2G : Les véhicules électriques, outils de la flexibilité du réseau électrique ?

https://www.services-rte.com/fr/decouvrez-nos-offres-de-services/participer-au-mecanisme-d-ajustement.html

https://bilan-electrique-2021.rte-france.com/

https://www.smartgrids-cre.fr/encyclopedie/la-flexibilite/quest-ce-que-la-flexibilite

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